We don't plan to become the Foxconn of Apple - Dieter Zetsche, CEO Daimler, Sept 2015

Il y aura des dommages collatéraux sur les voitures « Fordistes ». Trop heureux actuellement de produire et réussir à vendre des véhicules de 2 tonnes avec de fortes marges financières unitaires, ces derniers se trouveront piégés dans le fameux dilemme de l’innovateur, mais surtout par une absence totale de vision et d’exécution. Les villes disposant alors d’acteurs industriels crédibles, de rang mondial, capables de proposer des mobilités urbaines planifiables et itérables (nous y reviendrons), efficientes, avec des véhicules de petites tailles, pourront drastiquement augmenter les contraintes sur les possesseurs de véhicules Fordistes. Tous les outils législatifs existent, il suffit de serrer la vis. Et pour cela, les élus avaient besoin d’une alternative crédible et souhaitable à proposer aux citoyens. C’est quasiment chose faite.

Décrivons en détail pourquoi les Tech disposent d’une panoplie d’avantages vis-à-vis des Fordistes, pourquoi il est inutile de partir du véhicule et pourquoi le lien avec la multitude est stratégique. Le numérique, ce n’est pas virtuel. Pour bien comprendre les caractéristiques du monde moderne, devenu numérique, faisons un détour vers la philosophie du numérique.

Le phénomène numérique, dans la matière calculée est l’emblème, est un noumène, c’est à dire qu’il n’est pas visible, qu’il ne se manifeste pas sans interface. Notre assistant personnel de mobilité (APM) est cette interface qui réagit, qui produit des réalités informatiquement simulées. Seuls les Tech maitrisent cette interface fournissant le lien essentiel à la multitude. Cette virtualité permet de donner une représentation visible réelle des phénomènes qui opèrent invisiblement. Ces interfaces rassemblées dans notre poche permettent aux noumènes numériques de devenir réalité, de se manifester.

Les onze caractéristiques fondamentales pour décrire l’ontophanie numérique : la nouménalité (que l’on peut percevoir sans être capable de le décrire ni de l’expérimenter totalement), l’idéalité (capacité à être programmé), l’interactivité, la virtualité (capacité à être simulé), la versatilité (capacité à évoluer), la réticularité (capacité à fonctionner en réseau), la reproductibilité instantanée, la réversibilité (CRTL Z), la destructibilité, la fluidité (capacité à fournir une expérience fluide) et la ludogénéité (capacité à être expérimenter par le jeu).

Nous allons voir que les Tech sont en train d’utiliser ces caractéristiques pour répondre aux besoins de la multitude, les « usagers », mais aussi des villes, autre acteur essentiel. Ils embrassent maintenant le système dans sa globalité.

En maitrisant le lien avec la multitude, les Tech accèdent aux vrais usages donc aux vrais besoins. Ils vont s’attaquer aux véhicules et vont faire ce que les Fordistes n’ont jamais fait : produire des véhicules répondant aux besoins et standardiser les interfaces des composants du véhicule comme les composants de votre ordinateur. Didi a tout intérêt à ce qu’Uber utilise les mêmes composants du véhicule, l’expérience sera dans le véhicule complet mais aussi dans la commande, l’accès, le paiement, le stationnement.

Le passage du pétrole à l’électricité présente de nombreux avantages pour les Tech : capacité à numériser le véhicule, ses interfaces, simplification de l’objet, standardisation possible, durée de vie allongé et coût d’exploitation réduit. Le VE progresse au niveau de l’idéalité (capacité à être programmé), l’interactivité, la versatilité (capacité à évoluer), la reproductibilité instantanée. Quand les interfaces et les composants auront été standardisés et normés, le VE devenu commodité sera découpé en famille de composant, foxconnisé et encore plus profondément intégré aux services de mobilités. Encore une fois, il ne s’agit pas ici de produire des Tesla mais de simples VE urbains plus proches d’un scooter à quatre roues. L’exploitant pourra suivre l’usure de tel ou tel composant, automatiquement gérer la maintenance et même la mise production des pièces d’usure comme une imprimante aujourd’hui peut commander elle-même ses cartouches d’encre.

Les services de mobilité deviendront programmables en tant que « tout » : hard, soft, expériences, contraintes et récompenses dans plusieurs environnements et contextes.